jeudi 18 avril 2024

La lignée d'Aurélie Valognes

Chez Fayard - 2024

Pour son dernier récit, Aurélie Valognes nous livre un roman épistolaire.

C'est un style littéraire que j'affectionne tout particulièrement. J'ai donc pris beaucoup de plaisir à me plonger dans ce récit. 

Dans ce roman, on fait la connaissance de Louise, qui écrit à son autrice préférée, Madeleine. La jeune femme cherche en Madeleine des conseils précieux pour son avenir littéraire. Louise a une grande admiration pour Madeleine qu'elle considère comme son mentor.

Au fil des correspondances, des mois, des années, on suit les débuts prometteurs de Louise dans le monde littéraire, ses échecs, ses doutes, ses réussites. La problématique d'allier son envie d'écriture avec sa vie de femme, sa vie de famille. Et en parallèle, Madeleine livre son histoire. Et en se confiant, elle donne aux lecteurs une autre histoire à découvrir.

Ce roman est très touchant, il y a de magnifiques passages. A travers leur métier d'autrices, Louise et Madeleine nous livrent leurs conditions de femme dans la société, et aussi la vision très réduite du métier d'écrivain encore trop souvent défini comme un hobby plutôt qu'un véritable métier. 

Voici deux extraits qui m'ont particulièrement touchée :

"Peut être qu'un jour on arrêtera de penser qu'une femme doit être parfaite et réussir sur tous les tableaux, peut-être qu'un jour aussi on arrêtera de mentionner le métier de son mari ou son nombre d'enfants pour la présenter, et que faire bien le métier qu'elle a choisi sera suffisant".

"Je ne veux plus jamais qu'on me fasse passer pour inférieure, faible, inintéressante, non importante, stupide, misérable, égoïste ni méchante. Je ne veux plus jamais être de celles qui se taisent, laissent faire, n'osent pas, ou oublient la solidarité." 

J'ai aussi beaucoup aimé l'épilogue de l'autrice qui m'a donné envie de lire son précédent roman "l'envol". D'Aurélie Valognes j'ai surtout lu ses premiers romans très feel-good comme "Mémé dans les orties" ou encore "En voiture Simone". Des romans empreints de légèreté et d'humour même si des sujets de fond étaient déjà traités avec des personnages souvent émouvants. 

Dans ce dernier roman, l'émotion est bien présente.

A lire ! 

lundi 1 avril 2024

Le bureau des éclaircissements des destins de Gaëlle Nohant

Chez Grasset - 2024


Pendant la Seconde Guerre Mondiale, des millions de déportés ont été dépossédés de leur humanité, logement, et affaires personnelles.

Après la guerre, il a semblé important pour les autorités de rendre les objets de ces millions de déportés à leurs descendants, s'il y en avait. C'est dans cet optique qu'Irène a été engagée à ITS : l’International Tracing Service.
En 2016, la jeune femme se voit confier trois enquêtes : restituer un médaillon aux descendants de Wita, retracer l'histoire d'un Pierrot détenu par Lazar et revenir sur l'histoire de son ancienne collègue et amie Eva.

Un travail de fourmi attend Irène, qui ne sera pas sans la bouleverser, mais aussi les familles qu'elle va contacter. Irène va remonter le temps, retourner sur les lieux de la guerre pour tenter de retracer ces histoires et déterrer les fantômes du passé. Pour les familles des victimes, est-ce un soulagement de retrouver un objet qui appartenait à un aïeul ou bien est-ce remuer un passé douloureux ? Et Irène dans tout ça ? Elle ne doit pas oublier son présent, son fils, son histoire, au détriment des fantômes de la guerre.

Un roman bouleversant, très bien documenté, notamment sur le ghetto de Varsovie. Une magnifique écriture.

J'ai trouvé que le roman était tourné vers les destins de femmes. Des femmes maman dont on a arraché les enfants, des femmes protectrices envers les orphelins des camps, des femmes résistantes, des femmes courageuses. 

Malgré tout, j'ai eu un petit peu de mal à rentrer dans le récit. Peut-être à cause de la thématique ou du personnage d'Irène que j'ai trouvé d'un premier abord froid. Probablement une forme de protection pour cette femme qui est confrontée chaque jour à l'horreur de l'Histoire. Mais du moment où j'ai fait la connaissance de Wita, j'ai eu dû mal à lâcher le roman. Et pourtant parfois j'avais besoin de petites bulles d'oxygène pour ne pas être trop happée par les horreurs de cette guerre.

Un roman difficile, bouleversant, à découvrir.